YVETTE LUNDY
Par Laurence Boisson-Barbarot
« C’est mon premier rendez-vous avec Madame Lundy. Je sonne et la porte s’ouvre sur une petite dame dont les cheveux blancs comme neige auréolent un visage lumineux. Sitôt la porte refermée, elle passe derrière moi, fait glisser le manteau de mes épaules, en chasse la neige d’un coup de main rapide et sûr, et le suspend sur un cintre, précautionneusement. Je suis embarrassée et, tout à la fois, charmée par sa prévenance presque surannée. Puis elle m’entraîne vers le salon feutré où une coupe de Champagne et quelques biscuits de Reims m’attendent déjà. Vingt secondes ont suffi à me forger une opinion qui ne se démentira jamais au fil de nos rencontres : « Nous allons bien nous entendre toutes les deux ! » Et c’est alors qu’elle me dit, le regard vif et rieur : « Nous allons bien nous entendre toutes les deux. »
EXTRAIT
« La Résistance commence par un état d’esprit. Les actes suivent. Mon idée de la résistance n’est pas de mourir en martyre sur l’autel d’une France libérée, j’ai vingt ans et j’aime trop la vie pour m’offrir en sacrifice. J’ai plutôt en tête de pourrir la vie des Allemands comme ils pourrissent la nôtre jusqu’à ce qu’ils plient bagage ! Et les occasions ne manquent pas pour peu qu’on ait un peu d’imagination : inverser les panneaux indicateurs au passage des convois ennemis ou crever les roues de leurs vélos… /… C’est par ces peccadilles que j’entre en résistance. A ce moment- là, je n’imagine pas un seul instant le parcours que je ferai plus tard dans le réseau Possum et qui me conduira, pieds et poings liés, dans l’enfer des camps de concentration. »